Pour Christine Albanel, le Parlement Européen ne vaut rien
Guillaume Champeau
Alors que le Parlement européen a redit pour la troisième fois son opposition à la suspension de l'abonnement à Internet dans le cadre du rapport Lambrinidis voté par 90 % des eurodéputés, Christine Albanel a expliqué que le vote ne vallait rien, et que seul l'avis des représentants de l'exécutif des 27 états membres avait une valeur. Une maladresse à deux mois des élections européennes ?
C'était attendu. En ouverture de la reprise des débats sur la loi Création et Internet, l'opposition a mis en avant le vote par le Parlement européen du rapport Lambrinidis, par 481 voix contre 25. Le rapport, qui porte recommandation au Conseil européen de refuser d'utiliser la suspension de l'accès à
Mais fidèle à une ligne tenue depuis le vote de l'amendement Bono, la ministre de la Culture a écarté d'un revers de la main la portée du vote européen. Non sans prendre des risques politiques.
Christine Albanel a rappelé que "en Europe, il y a d'une part le Conseil européen, de l'autre le Parlement". Or, rappelle-t-elle avec beaucoup d'exagération sur la réalité, "les 27 (états membres réunis au Conseil) ont approuvé l'expérience française, ils ont dit qu'ils étaient intéressés". "Les 27 ont rejeté l'amendement 138 dit amendement Bono", raconte la ministre de la Culture, qui oublie de préciser que le Conseil s'était en fait contenter d'adopter d'un bloc l'ensemble du Paquet Télécom duquel la France, alors présidente de l'UE, avait pris soin de retirer au préalable l'amendement fâcheux anti-riposte graduée.
"Le rapport Lambrinidis existe, en effet il a trouvé une majorité", a concédé la ministre, qui a rappelé que le rapport défendait surtout l'idée qu'Internet était essentiel pour l'éducation. "Nous aussi nous défendons Internet, c'est une source de d'information, une source de connaissance. Nous sommes à fond comme tout le monde aux côtés d'Internet", a alors entonné Christine Albanel. Mais "ça n'est pas parce qu'on a une liberté qu'il faut que cette liberté tue les autres", a-t-elle tempéré. Elle s'est élevée contre "ce sophisme qui est un syllogisme" défendu par le rapport Lambrinidis, qui veut que "l'éducation est un droit fondamental, or l'éducation passe par Internet, donc Internet est un droit fondamental".
Sans surprise, elle a estimé que le rapport n'avait "aucune valeur juridique", ce qui est pour le moment vrai. Mais il n'est pas sans valeur politique.
Christian Paul a ainsi estimé que le vote du rapport par 90 % des eurodéputés de tous les bancs était un "baromètre formidable" à quelques semaines des élections européennes, et qu"à "piétinner le message qu'envoient les députés européens, on peut se prendre les pieds dans le tapis".
Avec malice, la député socialiste Sandrine Mazetier a noté que le rapporteur Frank Riester, qui a lui aussi balayé la portée du vote du Parlement européen, n'était "pas seulement rapporteur de ce texte, mais aussi membre de l'équipe de campagne de l'UMP pour les européennes".