Dreux: la justice inflige un camouflet à Philips, reprise du travail lundi
Le tribunal de Chartres a infligé un camouflet à Philips vendredi en ordonnant la reprise du travail à l'usine de Dreux, qui interviendra dès lundi, et en suspendant le plan social (PSE) dans l'attente d'une meilleure consultation des représentants du personnel.
La production, arrêtée depuis une semaine, devait reprendre sous huit jours sous peine d'une astreinte de 25.000 euros par jour, selon le jugement dont l'AFP a obtenu une copie. La direction a annoncé dans la soirée de vendredi que l'usine (212 salariés) reprendrait le travail lundi.
Le tribunal condamne aussi Philips à payer 1.000 euros chacun à la CGT, à FO et au comité d'entreprise, qui avaient saisi lundi en référé la justice.
"C'est une énorme victoire pour les salariés de Philips et plus globalement pour les travailleurs", a déclaré à l'AFP, Manuel Georget, délégué CGT. "Les travailleurs ont été tellement victimes de défaites, que cette victoire renforce aujourd'hui notre combativité", a-t-il ajouté.
Pour Solidaires, il s'agit d'"une victoire importante pour les salarié-e-s du site et pour les syndicats qui les soutiennent".
Dans son ordonnance, le tribunal pointe un manque d'informations "primordiales" pour l'examen du volet économique du plan social. Il estime par conséquent que les élus au comité d'entreprise n'étaient pas en mesure d'émettre un avis éclairé sur ce plan.
Pour l'avocate de l'union départementale FO, Me Sandra Renda, "cette décision, qui va faire jurisprudence, montre qu'on ne ferme pas en France une usine comme ça (...) Lorsqu'une entreprise se comporte aussi mal avec ses salariés en ne pensant qu'à ses actionnaires, une réponse reste possible: la sanction de la loi", a-elle déclaré à l'AFP.
Le TGI de Chartres avait été saisi à la suite de l'annonce de Philips en fin de semaine dernière de l'arrêt de la production du site d'assemblage de téléviseurs à écran plasma.
La direction estimait que la procédure d'information-consultation des représentants du personnel, qui a fait l'objet de 16 réunions, était terminée.
Les 212 salariés avaient été sommés par lettre samedi de ne pas se présenter à leur poste de travail lundi, sans que leur licenciement leur ait été notifié.
Cette façon de faire avait fortement ému le personnel, et le ministre de l'Industrie Christian Estrosi s'était dit jeudi "choqué" par l'envoi de ce courrier, tout en appelant à la reprise du dialogue social.
Sous la pression du gouvernement, Philips avait accepté de rouvrir les portes de l'usine vendredi matin, sans toutefois relancer la production.
La direction du groupe électronique avait aussi convoqué un nouveau comité central d'entreprise le 26 février, mais le PDG Joël Karecki avait affirmé vendredi, lors d'une conférence de presse à Paris, qu'il "n'y aurait plus d'emplois Philips à Dreux prochainement".
Depuis octobre, le personnel sait que la direction veut fermer le site, qui a déjà perdu 350 emplois en 2005 et 279 en 2008, en raison de pertes importantes (413 M EUR en 2008 selon Philips).
Vendredi matin, quelque 150 salariés de l'usine de Dreux avaient pu pénétrer dans l'usine.
A la mi-journée, certains étaient sortis du site en emportant des affaires personnelles : plantes vertes, calendrier, petit vase, etc.
"Je suis venue chercher mes affaires car je ne sais pas si lundi on aura accès au site, j'ai la gorge nouée de voir mes collègues faire la même chose", a témoigné Agnès Perdereau, 47 ans, dont 28 passés chez Philips. "C'est notre outil de production, notre savoir-faire, notre polyvalence qui s'envolent", estimait cette responsable des achats.