Saint-Denis : le service d'ordre de l'Elysée aurait giflé un journaliste
Une équipe de la rédaction de France 3 Ile-de-France affirme avoir été violemment prise à partie par le service d'ordre de l'Elysée, lors de la visite surprise nocturne de Nicolas Sarkozy en Seine-Saint-Denis, mercredi 23 juin.
L'équipe tournait un reportage consacré au trafic de crack, dans le quartier de la gare de Saint-Denis, quand elle a eu la surprise d'assister à l'arrivée du chef de l'Etat et de son service de sécurité. "Au cours du tournage, j’ai vu qu’il y avait soudain beaucoup de policiers autour du commissariat. Puis, j’ai aperçu Brice Hortefeux", qui accompagnait Nicolas Sarkzoy, raconte à Europe 1.fr Pierre Lassus, cameraman pour la chaîne publique.
Alors que les journalistes de France 3 se rapprochaient pour filmer la scène, un jeune homme est intercepté par le service de protection du chef de l'Etat après avoir insulté ce dernier. "Quand le service d'ordre de Nicolas Sarkozy l'a arrêté, j'ai essayé de filmer mais nous n'avons pas pu. L'un des hommes s'est alors approché de moi et m'a claqué directement, en disant 'on ne filme pas'", poursuit le cameraman.
Dans un communiqué, la préfecture de Seine-Saint-Denis "s'étonne de ces affirmations, eu égard à leur caractère tardif", et explique que "les services de police qui ont procédé [à l'arrestation] étaient des effectifs locaux et non le service de sécurité du président". Elle indique en outre que "des vérifications sont en cours".
"Pressions et maintenant agression, il est de plus en plus difficile pour la presse d'exécuter sa mission", déclare Jean-François Tealdi, secrétaire général du SNJ-CGT de France Télévisions. "Nous avons adressé une lettre à Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, afin qu'il saisisse l'Inspection générale des services et qu'une sanction soit prise contre le policier qui a frappé notre confrère. Nous porterons également plainte pour agression subite et atteinte à la liberté de la presse. Enfin nous demandons à Patrick de Carolis, président de France Télévisions, de prendre position sur cette agression."
POURSUITES POUR OUTRAGE
Agé de 21 ans, l'homme a été condamné vendredi, en comparution immédiate, à 35 heures de travaux d'intérêt général. Neuf jours d'incapacité totale de travail lui ont été prescrits suite à son arrestation. Il souffre d'ecchymoses mais n'a pas de fractures, a-t-on précisé jeudi de source judiciaire.
Poursuivi pour outrage par les policiers présents, le jeune homme risque une peine de six mois de prison et une amende pouvant atteindre 7 500 euros. Selon une première version, rapportée par le syndicat de police Alliance, l'homme aurait lancé au chef de l'Etat "Va te faire enculer connard, ici t'es chez moi". Mais le cameraman de France 3 a une autre version : le jeune homme aurait dit "suce-moi".
Le jeune homme n'a pas de casier judiciaire. Avant l'audience, son avocate, Me Saïma Rasool, a déclaré que son client avait "donné son opinion sur la vie politique à M. Sarkozy. De là, il y a eu une interpellation musclée". "Il n'y avait pas lieu à menottage, à plaquer au sol la personne", a ajouté l'avocate, qui précise que son client "a la tête défigurée, un œdème au niveau du visage, le nez amoché, des pansements" et "ne va pas du tout bien".
Elle a confirmé que son casier judiciaire était vierge, même s'"il y a eu quelques signalements". "Il est droit dans ses bottes par rapport à ses déclarations", dans lesquelles "il a exprimé son opinion vis-à-vis du président", a ajouté l'avocate, précisant que la plainte émanait des policiers.
M. Sarkozy était accompagné lors de cette visite dans des quartiers sensibles de la Seine-Saint-Denis du ministre de l'intérieur Brice Hortefeux, du préfet de police Michel Gaudin, du directeur général de la police nationale Frédéric Péchenard, et du préfet de Seine-Saint-Denis Christian Lambert.
Le président a sillonné de 21 heures à près de minuit ce département particulièrement touché par la délinquance, retournant notamment à la Cité des 4 000 à La Courneuve, qu'il avait promis de "nettoyer" au "Kärcher" il y a cinq ans, en juin 2005, alors qu'il était ministre de l'intérieur, après la mort d'un enfant, Sidi Ahmed, tué par une balle perdue.