UMP: règlements de comptes en Sarkofrance

Publié le par Désirs d'Avenir Castelnau-de-Médoc

UMP: règlements de comptes en Sarkofrance

Les journées parlementaires de l'UMP la semaine dernière ont été l'occasion de nouvelles passes d'armes au sein du camp présidentiel. Jour après jour, l'UMP ressemble au Parti Socialiste du Congrès de Rennes en 1990 : un camp dévasté par les rivalités personnelles, miné par les doutes et les inquiétudes. En 1990, François Mitterrand avait laissé ses anciens lieutenants se déchirer. En 2010, Sarkozy tente toujours d'entretenir un culte du chef qui frise le ridicule mais ne résout pas grand chose.

Xavier contre Jean-François
Le président du groupe UMP à l'Assemblée Nationale a décidé de prendre la direction de l'UMP. Cela fait des semaines qu'on en parle. Une précédente édition du Figaro Magazine avait relaté sur quelques pages les efforts du député-avocat pour virer Xavier Bertrand de son poste dans quelques semaines. Copé est même allé demander l'autorisation à Nicolas Sarkozy. A Biarritz, Copé a ouvertement posé sa candidature. Mercredi soir, il s'est confié, en « off », auprès de quelques journalistes : « Que nos relations avec Xavier Bertrand soient mauvaises, c'est connu de tout le monde. Il est tellement à l'opposé de moi. Pour comprendre, relisez les Deux infinis de Pascal… » Un autre député, proche de Copé, a ajouté : « L'UMP n'émet aucun son. Elle est inaudible à force de suivre le gouvernement. » Habituellement discret, Patrick Devedjian a également taclé, début septembre, le secrétaire national de l'UMP: « on n'a pas besoin de gentils organisateurs

Pourtant, Xavier Bertrand ne ménage pas ses efforts pour exister. Mais coincé entre l'omni-président de Sarkofrance et le président du groupe UMP à l'Assemblée, il n'a aucun espace. Personne ne l'écoute. Bertrand en est réduit à répéter les « éléments de langage » concotés à l'Elysée. Son porte-parole Dominique Paillé confiait d'ailleurs que « tout se décide à l'Elysée.»

Jeunes Pop, jeunes vieux.
La relève chez les jeunes est loin d'être acquise. La réélection nord-coréenne de Benjamin Lancar à la tête des Jeunesses sarkozyennes l'été dernier a été l'occasion de beaux déchirements : accusations de triche dans les votes, nombre d'adhérents tenu secret (10 000 ?), critique des outrances droitière du président sortant, etc. Le « sage » Roger Karoutchi, sénateur des Hauts-de-Seine, a été envoyé calmer les jeunes.

Réélu sans surprise, Benjamin Lancar s'agite pour exister. Sur le web, il dénonce la « gauchosphère »,  se lamente de l'absence d'activisme UMPiste sur la Toile et prévient qu'il va « taper » sur la gauche. A propos des retraites, il écrit sur Twitter : « Je confirme que j'aimerais travailler jusqu'à la mort car cela voudra dire que j'aurai vécu une vie de passion ! » A quand sa présence dans Secret Story ?

La bataille du remaniement
En promettant quatre mois à l'avance un remaniement gouvernemental, Nicolas Sarkozy a commis une belle bourde : il a déstabilisé nombre de ministres, encouragé les surenchères, avivé les rivalités. Un récent exemple ? Eric Besson ne prenait plus Hortefeux au téléphone, énervé que ce dernier ait fuité à la presse la présence de son chef de cabinet adjoint à la fameuse réunion du 4 août où se rédigea la circulaire anti-rom du 5 août. Eric Besson avait nié être au courant de l'existence de ladite circulaire. Quand le ministre de l'immigration se pointa à Europe 1 en début de semaine, Brice Hortefeux appela Jean-Pierre Elkabach sur son portable pour qu'il lui passe son collègue ministre. L'échange, à en croire le Point qui rapporte l'anecdote dans son édition papier du 22 septembre, fut musclé.

Plus l'échéance du remaniement - qui a été reculée à novembre - approche, plus les spéculations - sans intérêt pour le commun des Français - se multiplient. On tourne toujours autour des mêmes noms : MAM, Borloo, Baroin, Le Maire... ou Fillon. A dire vrai, tout le monde s'en fiche un peu... à part dans les rangs stressés des militants UMP. Le plus drôle de cette affaire est qu'elle a permis de disqualifier quasiment tous les prétendants : Michèle Alliot-Marie s'est faite planter par le licenciement de l'un de ses plus proches conseillers à cause de fuites dans l'affaire Woerth. On critique le bling bling de François Baroin, ministre du Budget dont la compagne vivait fiscalement à Las Vegas. On rappelle combien Jean-Louis Borloo sait être dilettante et peu concentré, voire franchement flemmard. Bruno Le Maire (Agriculture) est jugé trop jeune. Christine Lagarde s'est découragée.

Plus le suspense dure, plus les candidats disparaissent !

Fronde parlementaire... à l'UMP
Sur le sujet peu social des expulsions de Roms, la surenchère de l'été a fait quelques dégâts. Arlette Grosskost, députée UMP du Haut-Rhin, s'est lâchée lundi dernier : « Sur le fond, n'importe quel délinquant doit être poursuivi comme délinquant. Mais sur la forme c'est catastrophique. On exacerbe un populisme primaire qui n'attend que ça. Nous sommes dans un esprit de cour où les courtisans surenchérissent pour plaire au roi en faisant abstraction des réalités. On crée des divisions dans le peuple en oubliant la cohésion sociale et le bien commun

Sur les retraites, les désaccords s'affichent aussi. La semaine dernière, une voix s'était encore faite entendre pour dénoncer les pratiques gouvernementales. Chantal Brunnel, députée de Seine-et-Marne, a questionné Eric Woerth jeudi soir sur le sort fait aux femmes dans la réforme des retraites. Le ministre a botté en touche. Il est particulièrement désagréable de se faire tacler « en interne.» Certains députés UMP en ont assez d'être considérés comme de simples godillots. L'ampleur de la grogne, ininterrompue depuis deux ans déjà, est surprenante tant la majorité UMP est majoritaire au Parlement. En mars dernier, la débâcle des élections régionales avait secoué le Palais de l'Elysée. Le déni de réalité, à l'époque, en avait énervé plus d'un.

Ces militants qui disparaissent
Mais où sont passés les 370 000 adhérents de 2007 ? En janvier dernier, Xavier Bertrand, promettait la transparence en dévoilant ces chiffres : 253 645 adhérents au 31 décembre 2009; 277 171 un an auparavant. L'UMP n'affichait ainsi que 24 000 pertes d'adhésions en 2009. En fait, quelque 63 000 militants n'avaient pas renouvelé leur adhésion.

Les récents sondages sur les effets du basculement à droite de l'UMP peuvent également inquiéter : la cote de popularité de Nicolas Sarkozy aurait bondi de 20 points cet été parmi les sympathisants du Front National. Or elle reste globalement étonnamment faible, aux alentours de 35%. Cela signifie donc que Sarkozy a perdu des soutiens du côté centriste. Le 11 septembre dernier, François Fillon avait été pris à partie par des militants musulmans de l'UMP lors d'une fête départementale de l'UMP des Bouches-du-Rhône.
 
A Biarritz, le premier ministre a enjoint les centristes de « prendre le temps de la réflexion.» L'Elysée voit d'un mauvais oeil les tentations autonomistes du Nouveau Centre d'Hervé Morin ou de l'Alliance centriste du sénateur Jean Arthuis. Ce dernier défend depuis des semaines l'idée de primaires au Centre pour désigner un candidat commun à l'élection présidentielle.

Un parti divisé, des parlementaires boudeurs, des ministres désorientés, les comptes n'ont pas fini de se régler au coeur de la Sarkofrance.

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